Propos introductifs de Grégory Blanc
Madame la Présidente, Cher-e-s Collègues,
Nous ouvrons une nouvelle fois notre session plongés dans l’incertitude. Nous sommes le 15 octobre et la réalité d’un PLF pour 2026 demeure toujours incertaine. Surtout, en l’état des maquettes, une nouvelle fois les collectivités seront mises à contribution, notamment les Départements alors même qu’ils sont pour la plupart les plus en difficulté. L’irresponsabilité de ceux qui depuis quelques semaines prennent des décisions abruptes qui déstabilisent le Pays nous coûte cher. 3 à 4 fois plus que la suspension de la réforme des retraites.
De ce point de vue, dans les semaines qui viennent nous allons avoir ensemble une bataille à conduire pour faire valoir la voix des départements. La Bonne nouvelle d’hier : au-delà de la suspension des retraites, c’est l’abandon du 49.3, le renvoi du pouvoir et de la décision au parlement. C’est un changement de pratique fondamental, qui autorise enfin la construction de compromis dans le pays, politiques, mais aussi sociaux, économiques… entre l’Etat et les collectivités. D’ici l’adoption du budget, nous devons donc ensemble construire un rapport de force pour nous permettre d’assurer le financement de nos services publics. En adoptant une nouvelle méthode, on arrive à construire des compromis, entre l’Etat et les collectivités territoriales, avec les collègues de notre groupe nous y sommes très attachés.
Ceci étant, si l’incertitude revêt des formes multiples, une certitude se dégage quant à elle : notre collectivité départementale va s’inscrire durablement dans le carcan des difficultés financières de l’Etat, puisque nos recettes dépendent totalement, directement ou indirectement, de lui.
Mes collègues et moi ne cessons de le dire depuis les crises COVID et d’inflation, les chocs à venir nous obligent
- À changer de logiciels (1)
- À créer de nouveaux outils dans chacune de nos compétences (2)
- À réfléchir des recettes nouvelles tout en assurant la cohésion sociale (3)
- À repenser notre pilotage (4).
1. Changer de logiciels implique d’abord de renforcer la recherche et soutenir l’innovation. Depuis quelques mois, nous sentons dans quelques secteurs de ce Département une inflexion en la matière, et nous voulons le saluer, notamment pour la protection de l’enfance, en renforçant les interventions plus en amont pour faire face à l’éclatement des structures, ou en renforçant le virage domiciliaire pour répondre au choc du vieillissement. Nous y reviendrons lors des délibérations. Mais, pour préparer 2026, nous devons dès à présent aller plus loin sur ces domaines.
2. Créer de nouveaux outils, parce que pour préparer le monde qui vient, nous devons reconfigurer la forme d’intervention et la place du Conseil départemental dans l’aménagement du territoire. Certes la compétence est d’abord celle des Régions et intercommunalités, d’évidence, mais en Anjou, la bonne échelle pour impulser, c’est très souvent le département. Comment construisons-nous la dynamique avec les EPCI ? Car par ex., nous préparer à +4°C en créant un établissement public foncier, en assumant d’agir via le Projet alimentaire territorial (PAT), d’autres formes d’action ou encore, dans le domaine du vieillissement, en étant plus offensif sur l’habitat partagé. Seul, le Département ne le pourra pas, mais avec des initiatives citoyennes oui. Vous l’avez vous-même constaté lors de votre déplacement à Doué en Anjou pour mettre en valeur le travail de Bruno Cheptou. Le soutien à l’initiative citoyenne, locale, c’est du gagnant-gagnant.
3. Réfléchir des recettes nouvelles implique un travail sur la tarification sociale. Cela fait longtemps que nous avons un débat là-dessus : Dans les cantines, dans les EHPAD et sans doute ailleurs, aider financièrement ceux qui ont les moyens de payer n’est plus possible à l’heure des difficultés financières. Il faut des tarifications plus justes et plus efficaces : budgétairement recentrer l’argent public.
Entendre certains -et je le dis sans esprit polémique, notamment pour Philippe Chalopin qui l’a quelquefois exprimé- envisager la création d’un nouvel impôt local pour revenir sur les impacts de la suppression de la taxe d’habitation, et refuser par exemple la création d’un établissement public foncier (EPF) au motif que cela aboutirait une taxe spéciale d’équipement de quelques euros, est tout de même paradoxal. Il nous faut de la cohérence car la période l’exige.
Ce Département dispose de recettes plus faibles qu’ailleurs en raison des choix « précautionneux » faits dans les années 80-90. Nous pensons qu’il est urgent de mettre l’ouvrage sur le métier, dégager des moyens pour assurer nos services publics. Parce qu’à la fin, il faudra bien entretenir les ponts, rénover les collèges, prendre en charge les enfants en danger et nos concitoyens en situation de handicap, …
4. Enfin, comment repenser le pilotage et la gouvernance pour plus de proximité ? Le grand défi de l’ensemble de nos institutions, Madame la Présidente, cher-e-s collègues, sur ce point, nous pensons que le pari effectué en 2021 d’assumer nos désaccords comme nos points d’accords, dans la confiance, a été audacieux. Nous sommes, 4 ans après, arrivés à un stade de maturité démocratique à 10 000 lieux du paysage national. Nos familles partisanes sont diverses et pourtant, dans la proximité de nos territoires, nous savons parler d’une seule et même voix lorsqu’il s’agit de la mise en œuvre des politiques publiques.
Être plus efficient dans la dépense, ce n’est pas seulement plus de rationalité administrative, c’est aussi être capable de davantage de bon sens dans la mise en œuvre. Cela implique évidemment de remettre chaque élu sur le terrain, qu’il soit l’interface du Département dans chaque territoire, avec à ses côtés l’administration. Parce que c’est bien ça le sujet. A la Présidente et aux Vice-Présidents les arbitrages politiques et financiers. Aux conseillers départementaux le suivi dans la mise en œuvre.
Il y a 15 ans encore, les conseillers généraux étaient au cœur de ce qui se passait sur chaque canton. C’est cet esprit que nous devons retrouver, en mettant en place les maisons du Département. Chaque conseiller départemental doit disposer de services à ses côtés. Nous devons recréer du circuit court, de la responsabilité plus partagée. Nous pensons mes collègues et moi que cette singularité en Maine-et-Loire n’est pas un consensus mou, c’est au contraire la capacité à travailler ensemble.
Au moment où le pays appelle les politiques à davantage d’écoute, notre mode d’élection est une force. La proximité doit nous permettre d’éviter la froideur de courriers administratifs quelquefois trop vite partis. Nous en reparlerons pendant cette session.
A l’heure de contraintes financières durables, faisons le pari de franchir ensemble une nouvelle étape démocratique, en transformant de manière plus audacieuse l’organisation de notre collectivité.
Voilà Madame la Présidente, cher-e-s collègues, si cette DM ne porte pas en elle-même de grands points de divergences, elle ne corrige pas non plus les principaux désaccords que nous avons formulés lors du débat budgétaire de mars dernier. Gageons que nos échanges tout au long de cette session le permettront.
Bonne journée à tous.