INTRODUCTION

PAR GRÉGORY BLANC

Nous ouvrons cette session en pleine instabilité politique à l’échelle du pays alors même qu’il y a besoin d’apaisement. La brutalité de la dissolution et l’absence, une nouvelle fois, de véritable débat démocratique possible, faute de temps suffisant pour clarifier l’orientation, fait craindre le pire.

Notre Anjou n’est pas épargné. Chacun, ici, aura ses propres positions et cette assemblée n’est pas le lieu de la campagne électorale à venir. Il n’en demeure pas moins qu’il est nécessaire de tirer des leçons de celle qui vient de s’achever.

  1. Depuis 7 ans et de manière radicale depuis 2022, le Parlement, mais aussi et surtout les partenaires sociaux, les territoires et nos collectivités, sont bien peu pris en compte par le pouvoir macroniste. Pourtant, à chaque crise, ce sont les corps intermédiaires et les élus locaux qui ont dénoué les tensions sociales, nées de la verticalité des décisions. Notre société a besoin de se parler à elle-même, de retrouver le sens du dialogue et du compromis, donc a besoin de corps intermédiaires puissants.
  2. Le pilotage institutionnel est de plus en plus complexe. Nous n’arrivons pas à sortir de la crise du COVID, de la brutalité des confinements, qui s’est elle-même superposée à d’autres chocs à répétition depuis 15 ans. Financièrement, le Pays (et pas que l’Etat) n’arrive pas à sortir du « quoi qu’il en coûte ». Économiquement, ceux qui allaient bien en sont ressortis beaucoup beaucoup plus riches tandis qu’on continue de demander à ceux qui travaillent, sans parvenir à « joindre les deux bouts », de faire plus d’efforts : la réforme des retraites ou celle de l’assurance chômage en sont des illustrations.

Enfin socialement, la peur de l’Autre s’est renforcée. Si beaucoup ont repris le chemin d’avant, ceux qui demeurent isolés sont plus nombreux, les situations familiales plus difficiles, voire violentes, enfermant davantage d’enfants dans l’incapacité de se structurer, de se construire.

Nous sommes dans une société où les gens se rencontrent de moins en moins, ne se comprennent plus.

Pour notre part, les chemins qui conduisent au dialogue doivent être affirmés partout où c’est possible, le compromis recherché plutôt que l’affrontement.

Dans ce schéma, la décentralisation est un levier puissant. Rapprocher les décisions et les responsabilités du terrain, aider les acteurs locaux à bâtir des solutions. Il faut de l’humain pour retisser ce qui a été cassé par la verticalité hors sol.

Oui, il faut insuffler de l’humain en continu, favoriser la rencontre entre gens d’univers différents, aider ceux qui sont enfermés dans leur quotidien à sortir de chez eux : la vie associative, la culture de proximité, le sport amateur, les transports alternatifs, l’accès à l’habitat intergénérationnel et partagé, la mixité à l’école. Sur tous ces points… cela tombe bien, ce sont les missions du Département.

De ce point de vue, si nous avons sans doute en commun cette volonté d’une décentralisation plus aboutie, nous ne comprenons pas vos arbitrages. A ce Budget Supplémentaire encore plus qu’au Budget primitif, vous faîtes l’inverse et n’allez pas dans le sens de la décentralisation. Par exemple, vous inscrivez le renvoi de la gestion des EHPAD vers l’Etat. Le modèle du renvoi vers l’hospitalier, c’est celui où on écarte les mourants du reste de la société. C’est le modèle des hospices de vieux du XVIIè ou du XIXè siècle. On refuse de voir la déchéance, on cherche à effacer les vieux de la société. Nous ne voulons pas de ce modèle. Plutôt que de recentraliser pour des raisons financières, battons-nous ensemble pour que l’Etat lance enfin une loi « grand âge » et donne aux départements les moyens d’assumer leurs compétences !

Ce débat sur l’autonomie est symbolique des choix présentés aujourd’hui, qui sont dans la droite ligne du budget primitif, en pire. Tout pour le placement des enfants et, parallèlement, coupes dans la prévention (je rappelle, -500 000€ sur les TISF au BP), coupes dans le sport amateur (-100 000€ au BS), coupes dans la culture de proximité (-40 000€), coupes dans l’ouverture éducative au collège (-76 000€).

Ici, vous augmentez toujours les enveloppes pour placer les enfants, c’est-à-dire pour traiter les conséquences (à ce BS, 9M€ de plus s’ajoutent aux 14M€ déjà inscrits au BP). Et parallèlement, vous réduisez sur tout ce qui contribue à les éviter. Surtout, quand on fait l’addition de ces coupes : 300 000€ d’économies sur la vie associative, sur ce qui construit l’éveil et le collectif au local, franchement, c’est ridicule.

Alors oui vous faîtes des économies aujourd’hui qui se traduiront par plus de dépenses de placement demain. 300 000€ sur un budget total de fonctionnement de 740M€ !!! C’est si ridicule budgétairement et si lourd de conséquences humainement. Ces 300 000€, c’est vraiment ça qui fragilise un budget de 740M d’euros ou bien c’est l’envolée non maîtrisée des dépenses en protection de l’enfance ? Cette méthode technocratique de gestion, sans discernement, ce n’est pas sérieux.

Oui la situation budgétaire est contraignante. Il faut faire des économies, mais en changeant de politique en dépenses.

De fait, en remettant des sommes considérables sur le volet placement de la protection de l’enfance tout en réduisant les dispositifs alternatifs utiles pour les éviter… Vous constatez vous-même votre échec ! Dit autrement, on a des budgets placement qui explosent, des budgets prévention qui se réduisent et un nombre d’enfants en attente de solution plus fort que les départements autour de nous.

Le budget de protection de l’enfance a augmenté de 40 M€ en 3 ans, et une hausse de 70 M€, soit +70%, depuis l’appel à projet de 2016 décidé par la majorité départementale… et ça continue de marcher plus mal qu’ailleurs.

Cela nous pose d’autant plus de problème, vous le comprenez, que ce que vous diminuez ou supprimez, ce sont les points de budget découlant des orientations nouvelles des schémas, précisément celles qui nous ont conduit à les voter à l’unanimité. Enfance-famille, autonomie, culture, appels à projets sportifs, mise en place des maisons du département dans les territoires… à chaque fois, nous avons soutenu la volonté de construire des actions « hors les murs », consolider le tissu associatif local, soutenir les centres sociaux, aider les communes à mieux répondre aux besoins du quotidien.

Lors de cette session, nous contesterons pied à pied, à nouveau, ce qui, sous des dehors de modernité, n’est en définitive qu’un sombre retour en arrière. La priorité que vous donnez aux prises en charge en établissement c’est aussi le signe d’une société qui se résigne aux ségrégations.

Madame la Présidente, chers collègues, aujourd’hui plus que jamais, l’ordre à construire doit être articulé localement, dans la cohérence, avec et au plus près des habitants. Renforçons les collectivités pour que l’Etat se repositionne mieux sur ses missions. Nous ne sonnerons pas la fin du choc du COVID, nous ne remettrons pas du vivre ensemble, nous ne combattrons pas l’extrême-droite en redonnant à l’Etat des arguments en faveur de la recentralisation de compétences. La verticalité renforcée est un danger pour demain.

INTERVENTION SUR L’EDUCATION JEUNESSE

PAR JEAN-LUC ROTUREAU

Madame la Présidente, Chers Collègues,

Ce dossier n’est sans doute pas le plus important de notre session. Cependant il est assez symbolique : la recherche d’économies se fait quasiment sur tous les secteurs, sans que nous ayons vraiment débattu du degré d’importance que nous donnons aux actions engagées !
Réduire des actions pédagogiques et citoyennes de 6500€ ou un appel à projet éducation de 30 000€ par exemple, ce n’est sans doute pas la fin du monde, et c’est assez facile… Mais quels messages voulons-nous faire passer, quel est le sens de ces décisions ?

Alors que l’éducation et tout ce qui concourt à la formation de la jeunesse devraient être nos priorités, vous rabotez des crédits uniquement par la règle à calculer. Et dans le même temps, le budget supplémentaire proposera 9 Millions de plus pour la protection de l’enfance ! Où est la cohérence ?

Nous n’en voyons pas et il nous semble que ces soustractions sont des économies de bouts de chandelle injustes au regard des enjeux qui nous sont posés. C’est pourquoi nous sommes contre cette délibération.
Par ailleurs, concernant la restauration scolaire, nous avions demandé à mettre en place une tarification sociale, c’est-à-dire selon le revenu des familles, comme il se fait dans la plupart de vos communes. Nous maintenons cette demande.

INTERVENTION SUR LE SPORT

PAR JEan-luc rotureau

Lors du vote du BP, nous n’avions pas approuvé les orientations proposées, compte-tenu de la baisse de certaines lignes dédiées au sport amateur, comme celle de l’aide aux projets par exemple.
Une seconde couche est proposée lors de ce budget supplémentaire puisque plus de 100K€ sont à nouveau supprimés.
Seule la réduction du soutien à la filière équestre peut s’entendre, nous l’avions d’ailleurs suggéré.
Nous l’avons dit en commission, il y a lieu de s’interroger sur le sens de ce que nous voulons. Par exemple l’appel à projets va passer, de par vos décisions, à 80K€ alors qu’il était encore de 180K€ l’an dernier ou même jusqu’à 250K€ précédemment….

Nous ne voyons plus l’aide au sport que nous aimons, que nous voulons, qui donne une autre dimension à la pratique sportive et à l’engagement des milliers de personnes pour le faire vivre.
Tout ce qui est soutien à des projets sociaux diminue alors même que nos compétences sont d’abord sociales et que toutes les politiques devraient converger dans ce sens ! Il y a selon nous des contre sens.
De la même façon que ce que l’on a exprimé pour la délibération sur l’éducation-jeunesse, nous ne pouvons partager ces choix. Il s’agit de mauvaises économies.

INTERVENTION SUR LA PROTECTION DE L’ENFANCE

PAR ELODIE JEANNETEAU

Madame la Présidente, chers collègues,
Je suis stupéfaite de ce qui se passe en commission. Nous sommes tous les yeux écarquillés, à entendre à chaque réunion le nombre d’enfant placés qui augmente. On nous présente des conventions et des subventions à attribuer, machinalement. La situation qui s’empire chaque mois est presque devenue normale, et pour moi c’est ça le plus choquant.


Pourtant vous aviez dit Madame la Présidente, dans une interview à France Inter en 2021 qu’il n’y aurait plus un seul enfant en attente de placement dans notre département. Nous ne pouvions que partager votre ambition. A quoi est du cet échec alors, puisque les 9 millions d’euros supplémentaires encore ajoutés cette année n’ont rien changé ? Nous n’avons toujours pas d’évaluation, alors qu’on ajoute encore 9 millions au budget supplémentaire pour l’enfance. Quel impact et quelle efficacité de nos dépenses ? On ne sait toujours pas. Ajouter de l’argent c’est bien, mais combien de millions allons-nous ajouter encore pour créer des places avant de voir qu’il faut peut-être s’attaquer en priorité à la racine du mal ?

La racine du mal vous la connaissez bien, c’est le mal être dans les familles, les violences intrafamiliales et les agressions sexuelles sur les mineurs. Chaque jour, dans le Maine et Loire, il y a 5 nouveaux cas de violences intrafamiliales et 2 agressions sexuelles sur mineur. Il y a en sans doute en cours, à la minute où je prononce ces mots. A ces maux de famille, il y a un antidote fondamental : la prévention, vous le savez. Les professionnels du terrain sont unanimes pour dire qu’elle est notre seule chance d’éviter les placements et rétablir l’équilibre dans les cellules familiales de notre société qui souffre.

Finalement, la prévention devrait être votre priorité, alors qu’on ne le voit dans le budget : elle régresse. Et pourtant ce ne sont pas les outils qui manquent pour agir. L’exemple le plus parlant, c’est la baisse du budget pour les techniciens de l’intervention sociale et familiale (TISF). Ces professionnels interviennent auprès des familles et des personnes qui traversent des difficultés passagères en vue de préserver leur autonomie et de les soutenir, en les aidant dans leur quotidien.
Leur travail consiste justement à éviter tant que faire se peut les placements, en agissant en amont auprès des familles en difficulté. Il est inconcevable de baisser un tel budget.

Vous l’avez deviné, nous ne sommes pas d’accord avec votre orientation qui consiste d’une part à baisser le budget de la prévention, d’autre part à ne pas être moteur dans les outils de prévention efficients.
Je vous remercie.

INTERVENTION SUR L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES

PAR BRIGITTE GUGLIELMI

Le rapport que vous nous présentez cette année évolue positivement en faveur de l’égalité entre les
femmes et les hommes, même si nous ne sommes pas encore arrivés au bout de nos efforts. Par exemple nous saluons bien sûr l’évolution de la rémunération nette qui aujourd’hui, grâce notamment au RIFSEEP, est identique entre les 2 genres.
Par contre, comme dans le reste de la société, parmi les 10 postes les mieux rémunérés, 7 sont dévolus aux hommes, et 3 aux femmes.

Les femmes ne sont pas encore équipées pour prétendre aux mêmes avantages que les hommes et c’est au niveau de l’éducation que l’effort doit être majeur. Or nous constatons que les interventions dans les collèges sont encore trop portées sur l’histoire, en mettant en valeur des femmes importantes, ce qui est nécessaire mais pas suffisant. Il nous faut porter plus d’attention à la prévention sur le consentement par exemple, sur l’appropriation du corps et sur l’égalité réelle. Il nous faut rendre plus lisible les actions de prévention et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles.


Dans ce cadre, la baisse des subventions aux associations concernées n’est pas un signe positif donné. Car si les femmes sont aujourd’hui massivement présentes sur le marché du travail, représentent presque la moitié de la population active, qu’elles sont de plus en plus diplômées en réussissant à l’école et à l’université mieux que les garçons, les inégalités de traitement dès la petite enfance marquent encore les parcours et le devenir des femmes, et des hommes à leur côté. C’est pourquoi il est primordial de commencer le travail d’égalité réelle dès la prime enfance, à l’école puis au collège et au lycée.


Concernant les collèges, par exemple, les actions pédagogiques et citoyennes qui pourraient aller dans ce sens ne devraient pas baisser comme c’est le cas dans le BS qui va nous être présenté tout à l’heure. C’est toute l’importance de la prévention que nous ne trouvons pas assez présente dans les politiques menées, en faveur de l’égalité femme/homme mais plus globalement en faveur des inégalités sociales globales.
Je vous remercie.

INTERVENTION SUR LA CULTURE

PAR VINCENT GUIBERT

On peut comprendre le qualificatif de « responsable » par rapport à tous ces arbitrages un peu difficiles, mais comprenez que nous ne pouvons pas nous satisfaire d’une baisse dans la mesure où, comme nous l’avons déjà dit plusieurs fois, le budget de la culture par rapport au budget global du Département est quand même très faible. Je rappelle le chiffre que nous avions donné la dernière fois : 0,66 %. Faire des coupes minimes sur un budget aussi peu important nous questionne forcément.

D’autre part, vous l’avez souligné, madame la présidente, dans votre introduction et nous en avons parlé au début, nous vivons des temps troublés. Parmi les leviers possibles pour que la société puisse surmonter toutes ces difficultés, il y a ceux que nous avons énumérés tout à l’heure : l’éducation, le sport mais évidemment aussi la culture. La culture permet la rencontre avec l’autre, elle permet de comprendre la différence avec l’autre, un peu grâce au théâtre par exemple, et de comprendre la complexité des débats. Donc, globalement, c’est bon pour la démocratie, et plus encore dans ces temps troublés.

Nous voterons contre cette délibération.

INTERVENTION SUR LES EHPAD

PAR BRUNO CHEPTOU

D’abord, il faut rappeler comment fonctionnent les EHPAD. Ça fonctionne sur trois budgets : le budget résident, financé par les résidents et leurs familles, le budget dépendance sous la responsabilité du département, et le budget soin sous la responsabilité de la Sécurité sociale, donc de l’ARS. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela signifie qu’aujourd’hui, la responsabilité du département est de mener une politique d’accompagnement dans les EHPAD, c’est-à-dire d’accompagner les personnes au quotidien, de les aider à se rendre à la salle de restauration, de les assister pour leurs toilettes. Eh bien, cela va être fusionné avec les soins, ce qui signifie que la personne sera considérée comme ayant des problèmes de santé. C’est pourquoi la majorité n’a pas été d’accord, car une personne doit être vue dans sa globalité. C’est la première raison. La deuxième raison est que nous allons maintenir le travail sur l’autonomie au domicile et ne pas le maintenir dans l’établissement. Cela voudrait dire qu’à un moment donné, la personne qui est dans l’établissement est moins prise en compte dans la réflexion menée au niveau du département que lorsqu’elle est chez elle. Mener une politique sur la dépendance, sur la perte d’autonomie, c’est mener une politique sur l’ensemble du parcours, qui peut se dérouler à la fois au domicile et aussi dans l’établissement. Il faut inventer des lieux intermédiaires entre le domicile et l’établissement, car notre objectif doit être de trouver des solutions pour bien vieillir.

Retrouvez les explications de Bruno Cheptou :

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