Session de juin 2025 – Introduction de Grégory BLANC

L'Anjou en action (identité visuelle du groupe)

« Quand l’ONU et le droit international sont absents dans un moment où les logiques de puissance et de guerre s’affirment, cela altère la confiance dans toutes les institutions. Or, quand les institutions se délitent, la confiance entre les peuples comme entre les hommes s’affaisse. »

Madame la Présidente,

Cher-e-s collègues,

Notre rôle, notre responsabilité d’élu, c’est de donner du sens, définir démocratiquement la pertinence des orientations à prendre au regard d’une situation, d’un contexte.

En vrai, comment ouvrir cette session en parlant d’abord Festival d’Anjou ou Tour de France féminin alors même que la fragmentation du monde s’affirme chaque jour davantage. Il est évidemment difficile d’inaugurer cette session sans faire le lien avec l’échelle globale. Le contexte est terrible. La France et ses territoires ne sont pas isolés. Précisément, les choses sont liées : ce qui se passe à l’échelle globale a des impacts à l’échelle locale.

Quand l’ONU et le droit international sont littéralement absents dans un moment où les logiques de puissance et de guerre s’affirment comme jamais depuis la 2nde Guerre Mondiale, cela altère la confiance dans toutes les institutions. Or, quand les institutions se délitent, la confiance entre les peuples comme entre les hommes s’affaisse.

Mais si aucune mort n’est supérieure à une autre, toutes les guerres ne se valent pas. Refuser de distinguer entre les guérillas, les guerres comme au Soudan, et les exactions de la Russie, d’Israël, des Etats-Unis (et demain, pourquoi pas de la Chine ?), c’est en vérité accepter de mal nommer ce qui sape les fondements de la paix : ce sont aujourd’hui les pays leaders de la Planète qui écrasent le respect de l’Autre, la souveraineté des Peuples, c’est-à-dire le droit et l’Etat de droit.

Le drame du moment est que ces mouvements d’extrême droite de remise en cause des institutions et du droit croisent les tensions déjà brutales nées du dérèglement climatique et de la transition démographique. Elles croisent aussi cet enjeu matériel de la crise des finances publiques. Les caisses sont vides et les besoins bien réels.

Dans ce contexte, certains, à droite, veulent affaiblir nos protections et mettre davantage à contribution les travailleurs. Chaque jour une nouvelle idée pour supprimer tel service public ou pour augmenter l’impôt qui touche tout le monde, mais pas de manière égalitaire. D’autres, le plus souvent à gauche, se contentent de dire qu’il ne faut rien changer, il y aurait juste à prélever l’argent chez « les riches ». La justice fiscale est évidemment indispensable, mais cela ne suffira pas.

Madame la Présidente, chers collègues, face à une situation de tension sur les finances publiques – et cela va perdurer-, face à la remise en cause du droit et donc de la confiance dans nos institutions, à nos yeux, il est urgent de redonner du sens, de définir des priorités et d’engager des réformes audacieuses.

De ce point de vue, ce qui est vrai pour la France l’est aussi pour notre Département.

L’examen du compte administratif démontrera une nouvelle fois combien ce Département est fragile de la faiblesse de ses recettes et de sa dette. Cette réalité est vieille des choix des élus sous Jean Sauvage, André Lardeux et Christophe Béchu. La Vendée, La Loire-Atlantique, la Mayenne et la Sarthe, qui ont fait alors d’autres choix, ne connaissent pas un niveau de difficultés semblable au nôtre. Notre Département est plus en difficulté que nos voisins, et c’est lié à l’Histoire.

Nous devons donc innover, c’est-à-dire avec lucidité faire évoluer les modalités budgétaires. Dans la situation, être prudent, ce n’est pas être attentiste. Être prudent, ce n’est pas attendre que les choses s’éclaircissent, mais au contraire bouger avec précaution pour dégager des marges de manœuvre.

Nous devons ainsi innover pour repenser une contribution plus juste de chacun au service public, par exemple en mettant en place des tarifications au quotient familial dans les cantines, dans les EHPAD, dans les services d’aide à domicile. Nous pensons qu’il est plus qu’urgent d’ouvrir ce chantier pour créer davantage de cohésion.

Quand nous sommes Marie-Pierre Martin, Bruno Cheptou, Jean-Luc Rotureau et moi à l’AG de l’ADMR 49, et où la fédération explique qu’elle a augmenté le reste à charge de 1€ par heure réalisée pour parvenir à l’équilibre financier, le tout sans régler le sujet de l’attractivité du métier. On comprend vite que cela ne fait que repousser les problèmes. Surtout : c’est évidemment ceux qui sont juste au-dessus de l’aide sociale qui seront les plus impactés, c’est-à-dire ceux qui gagnent entre le SMIC et le revenu médian. Or, c’est précisément ceux à qui on demande de faire les efforts les plus importants au regard de leurs revenus. Nous pensons profondément que c’est cela qui provoque les colères.

La banque alimentaire, le secours populaire comme les restos du cœur ne cessent de le répéter : la part des travailleurs précaires qui les sollicitent est grandissante. Notre responsabilité au Département est de remettre de la progressivité partout où c’est possible. Notre collectivité ne peut pas tout faire mais elle doit prendre sa part : la mise en place de tarification sociale est un enjeu de cohésion sociale. La priorité, c’est aussi d’aider ceux qui travaillent et ne parviennent pas à joindre les deux bouts.

De la même façon, dans les dépenses, nous devons tenir compte de l’hétérogénéité des situations. Vous avez évoqué différentes actions du Département, comme la protection de l’enfance ou l’échelonnement d’investissements. Au-delà de ces actions, c’est le débat qui s’est tenu en commission des solidarités sur les subventions aux associations. A un moment donné, il est sage de mettre fin à la technique du rabot qui s’applique aveuglément, a fortiori quand l’Etat recule et quand la Région de Christelle Morançais pratique la politique de la terre brûlée, retirer la délibération sur ce sujet est une décision de sagesse. A nos yeux, ce Département doit se doter d’un outil d’ingénierie sur les associations. Nous devons faire un état des lieux et redéfinir notre accompagnement. Dans les temps qui viennent, nous allons collectivement avoir besoin des associations.

Sur d’autres politiques, il faut aller plus loin, notamment intégrer l’Indice de positionnement social dans les modes de calcul des dotations et subventions aux collèges. On ne peut pas aider tous les collèges de la même façon au regard des disparités sociales qui existent en leur sein.

Madame la Présidente, cher-e-s collègues, nos sociétés sont à un tournant politique, notre univers bascule progressivement depuis 10 ans sans qu’un seul des contrecoups ne parvienne à rééquilibrer la situation. Nous entrons dans une spirale qui nous oblige à reconfigurer les outils nationalement mais aussi localement : nous devons prendre notre part.

Permettez-moi enfin de conclure en saluant Florent Poitevin et Steven Pruneta, le départ de ces deux têtes dans l’exécution des décisions politiques ne sont pas anodins. Ils marquent aux aussi un tournant. Mais avant de voir comment construire demain avec leurs successeurs, nous voulons saluer Florent Poitevin, arrivé avec Jean-François Arthuis-Brault, à un moment où cette collectivité se retrouvait les caisses vides et ses cadres tous partis vers ce qui brillait. Il a fallu des hommes et des femmes pour relever les pierres et colmater les fuites. Bonne chance à Florent Poitevin dans la suite de sa carrière.

Merci aussi à Steven Pruneta. Parmi les directeurs de cabinet, il y a les adeptes des coups tordus, et il y a ceux qui s’imprègnent des lieux, qui accompagnent le chef de l’exécutif tout en sachant fluidifier les relations avec les services, les partenaires, les élus minoritaires. A la place qui est la nôtre, nous avons apprécié ces relations de travail.

Bref : Bon gouel ha kenavo comme disent les bretons !

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